USDC : Retour sur un drame évité de justesse
Déjà victime d’un bear market qui semble durablement s’installer, l’industrie crypto était au bord de la rupture. Le marché des USDC a failli plonger ce secteur dans ce qui aurait été l’une des crises les plus spectaculaires de l’écosystème. Ceci, alors que ce dernier se débat encore contre les conséquences du naufrage de certains mastodontes comme FTX. Pourtant, ce qui a provoqué la tourmente des détenteurs d’USDC était, de loin, une cause externe inattendue : le système bancaire. C’est, en effet, à la chute de la Silicon Valley Bank (SVB), que se rattachent les déboires récents de l’USDC. Retour dans cet article en trois actes, sur le drame qu’aurait sans doute vécu Circle, sans l’intervention des régulateurs américains.
Acte 1 : l’USDC perd ses couleurs avec la chute de SVB
Nous sommes, vendredi 10 mars. Comme un couperet, l’information tombe : la Silicon Valley Bank (SVB) a subi un krach, le pire depuis 2008. C’est la troisième banque commerciale, après Silvergate et Signature Bank, à s’effondrer en l’espace de quelques semaines. Jusqu’ici, ces trois banques américaines étaient considérées comme étant les plus favorables à l’industrie crypto. C’est dire combien la nouvelle de cette chute inattendue ne passe pas inaperçue auprès de la communauté crypto. D’autant que nombreuses étaient les compagnies cryptos qui traitaient avec l’une de ses banques.
La nouvelle a davantage suscité l’inquiétude sur le marché des stablecoins. Car, Circle, l’une des compagnies les plus actives de ce marché à travers son stablecoin natif USDC était cliente de SVB. Cette dernière était officiellement le dépositaire des quelque 3,3 milliards nécessaires pour maintenir la parité de l’USDC au dollar. Une question qui taraude alors l’esprit de tous les analystes : l’USDC s’en sortira-t-il indemne ?
Si dans les heures qui ont suivi la nouvelle l’espoir d’une réponse affirmative était envisageable, ce dernier s’est vite évaporé par la suite. Dans un communiqué, Circle a annoncé l’échec de la procédure de retrait de ses actifs engagée auprès de SVB. C’est alors la panique au sein des utilisateurs. Du jour au lendemain, la valorisation de l’USDC est tombée en miettes. La crypto, censée valoir 1 dollar, ne vaut plus que 87 cents samedi 11 mars. Elle perd ainsi son ancrage au dollar. Désormais, des actions urgentes s’imposent au risque de voir l’industrie crypto sombrer. Ces dernières ne se feront d’ailleurs pas attendre.
Acte 2 : les régulateurs américains à la rescousse de l’USDC
L’USDC maintenant à terre, il faut trouver une solution. Car la situation est tout sauf bonne pour les parties prenantes. Elle est surtout préoccupante pour les investisseurs qui risquent gros si rien n’est fait. Le gouvernement américain pourrait également y laisser quelques plumes puisque la situation menace l’économie elle-même sous pression.
On comprend plus aisément pourquoi, dans ce contexte, chacune des parties prenantes s’est activée pour tenter de résoudre la crise. Récemment, on a su que la première à avoir œuvré dans ce sens, c’est Circle elle-même. En effet, dans la foulée de la perte d’ancrage de l’USDC au dollar, l’entreprise avait reçu une offre de crédit de Coinbase. Cette dernière lui avait notamment proposé les 3,3 milliards de dollars utiles pour maintenir la parité USDC-dollar.
L’offre, acceptée par Circle, n’attendait plus qu’à être officiellement actée. L’entreprise se fera toutefois doubler par les autorités américaines. D’abord, par la Federal Deposit Insurance Corporation (FDCI). Compte tenu des pressions engendrées, la FDCI annoncera, lundi 13 mars, sa décision dans l’affaire. Celle d’autoriser toutes les demandes de retrait auprès de SVB, entité qu’elle contrôle désormais. Un choix qui implique donc que Circle entre en possession de ses fonds. Une nouvelle qui la rend à nouveau capable d’émettre sans difficulté son stablecoin natif, l’USDC.
Ensuite, ce sera au tour de la Réserve fédérale américaine (Fed) d’annoncer une série de mesures destinées à équilibrer le système bancaire. L’ébranlement de celui-ci étant, au fond, le fait de la Fed. Cette dernière a fragilisé le système financier par sa politique agressive de hausse du taux des fonds fédéraux. Quoi qu’il en soit, l’annonce de ces nouvelles par les autorités américaines a eu de l’effet sur les cours de l’USDC. Un impact tellement positif que quelques jours après avoir été au plus bas, ces derniers ont retrouvé leur lettre de noblesse.
Mais si ces choix gouvernementaux ont sans aucun doute été salvateurs pour le stablecoin, ils n’éclatent pas les risques. Ceux-ci sont encore bien présents, peut-être même avec plus de persistances qu’auparavant.
Acte 3 : L’USDC reprend des couleurs, mais des risques demeurent
Après quelques jours de sueurs froides, les investisseurs et utilisateurs peuvent enfin souffler : Un USDC vaut à nouveau un dollar. La tempête est passée, se disent-ils. Une opinion que les récentes décisions des régulateurs laissent d’ailleurs penser. Ce n’est pourtant pas l’interprétation que le patron de Circle fait des évènements après leur survenue.
Dans une entrevue qu’il a accordée jeudi 16 mars, Jeremy Allaire est revenu sur ces événements. S’il est vrai, soutient-il, que la crise a été évitée de justesse, les risques ne se sont pas dissipés pour autant. Comme l’épée de Damoclès, l’USDC est encore menacé par un risque de contagion du système financier. Des menaces entretenues par la Fed en particulier, qui fait office de sauveur et de bourreau à la fois.
Allaire n’y est pas allée de main morte avec la Fed et sa politique dont il a ouvertement critiqué la pertinence. Pour le dirigeant, le fait que l’institution continue de relever le plafond de ses taux sur les fonds fédéraux reste incohérent. Surtout, quand il est établi que cette stratégie met tout le système financier et boursier en péril. Dans ce contexte, des entreprises comme Circle constituent la cible d’un potentiel naufrage bancaire. Cela étant, la compagnie ne compte pas rester spectatrice d’un revers qui pourrait la rattraper malgré elle.
Le patron a indiqué que Circle compte désormais travailler activement à minimiser son exposition financière le plus possible. Un choix opérationnel qui implique pour l’entreprise de rehausser « transparence quotidienne dans les bons du Trésor ». C’est, selon Allaire, le seul gage de protection durable contre les répercussions des décisions prises par les régulateurs américains.
Pour l’agence de notation financière américaine Moody’s, l’USDC devra désormais naviguer en terrain miné. Le stablecoin pourrait perdre en croissance avec le resserrement de la réglementation crypto.
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Diplômé de Sciences Po Toulouse et titulaire d'une certification consultant blockchain délivrée par Alyra, j'ai rejoint l'aventure Cointribune en 2019. Convaincu du potentiel de la blockchain pour transformer de nombreux secteurs de l'économie, j'ai pris l'engagement de sensibiliser et d'informer le grand public sur cet écosystème en constante évolution. Mon objectif est de permettre à chacun de mieux comprendre la blockchain et de saisir les opportunités qu'elle offre. Je m'efforce chaque jour de fournir une analyse objective de l'actualité, de décrypter les tendances du marché, de relayer les dernières innovations technologiques et de mettre en perspective les enjeux économiques et sociétaux de cette révolution en marche.
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