Pas de blackout avec des mineurs de Bitcoin !
Le blackout en Espagne est l’occasion de rappeler que l’industrie du Bitcoin aurait certainement pu permettre d’éviter la catastrophe.
En bref
- L’Université de Cambridge présente le Bitcoin comme une chance pour les gestionnaires de réseau.
- Le Bitcoin permet d’éviter les blackout et de réduire les émissions de méthane dans l’atmosphère.
- Que font les mineurs de bitcoin exactement ? À quoi sert l’électricité consommée ?
- Bitcoin, la monnaie de réserve internationale en puissance.
Bitcoin, combien de GW ?
Comme un signe, l’université de Cambridge vient de publier un rapport dans lequel elle qualifie l’industrie du Bitcoin de « contributeur clé à la résilience du réseau » en offrant au gestionnaire de réseau une « stratégie axée sur la demande ».
Les résultats se basent sur une enquête menée auprès de 49 mineurs de bitcoin représentant 48 % de la puissance de calcul globale (hashrate). À noter que les mineurs nord-américains représentent 80 % de l’échantillon, soit deux fois plus que leur poids réel au niveau mondial.
Verdict : la consommation d’électricité annuelle globale du réseau Bitcoin tourne autour de 140 TWh et génère 40 MtCO2e d’émissions de gaz à effet de serre. Cela correspond à une puissance électrique de 7,3 GW, comparable à celle de la République tchèque.
Mais surprise, il ressort que les sources d’énergie durables sont finalement majoritaires (52,4 %). L’hydroélectricité arrive en premier (23,4 %), suivie par l’éolien (15,4 %), le nucléaire (9,8 %) ou encore l’énergie solaire (3,2 %). Les combustibles fossiles sont principalement le gaz naturel (38 %) et le charbon (9 %).
En tout, l’industrie du Bitcoin consomme 0,54 % de la production mondiale d’électricité. Autre information précieuse, les mineurs déclarent payer en moyenne 0,045 $ le kWh. Ce prix d’ami suggère qu’il s’agit surtout d’électricité qui serait autrement gaspillée, c’est-à-dire celle produite par les EnR.
Voilà pour les chiffres bruts. Comme souligné en introduction, le rapport met aussi en exergue l’atout que constitue l’industrie du bitcoin pour équilibrer les réseaux électriques. Le gouvernement espagnol ferait bien de lire…
En effet, les mineurs de bitcoin offrent plus de résilience face aux pannes soudaines, la raison étant qu’ils peuvent se débrancher du réseau instantanément.
Un fusible de luxe
L’équilibre du réseau électrique par la demande apparaît de plus en plus essentiel pour accommoder à moindre coût l’essor des énergies intermittentes et le casse-tête qu’elles représentent pour les gestionnaires de réseau.
Historiquement, la fréquence du réseau était maintenue à 50 Hz en augmentant ou en réduisant la production des centrales « de pointe ». Ces centrales électriques sont conçues pour démarrer et s’arrêter rapidement lors des pics de demande ou en cas de pannes impromptues. Il s’agit typiquement des barrages et des centrales à gaz.
Or, en Espagne, le gaz ne représentait que 3 % de la production d’électricité au moment du blackout. C’était 73 % pour l’éolien et le solaire qui ont la priorité. Malheureusement, il semblerait que la prééminence accordée au renouvelable soit en bonne partie responsable du blackout :
Et c’est là que les mineurs de bitcoin entrent en jeu en tant que variable d’ajustement par la demande. Ils offrent une solution de délestage aux opérateurs de réseaux pour équilibrer en temps réel la demande et la production d’électricité. Aucune autre industrie ne peut réagir aussi vite.
Le rapport souligne d’ailleurs que 57 % des mineurs se sont effacés sur demande en 2023, rendant un total de 888 GWh au réseau. Cette symbiose électrique marche si bien que le gestionnaire du réseau texan (ERCOT) a récemment annulé la construction de plusieurs centrales à gaz en raison des 3 GW que les mineurs peuvent rendre au réseau à tout moment.
Cerise sur le gâteau, les mineurs sont une manne financière non négligeable pour les énergéticiens qui ont cruellement besoin d’argent pour financer la transition énergétique.
Bitcoin vs Méthane
La chaleur que produit l’industrie du bitcoin peut également être recyclée. Chauffage urbain, culture en serre, chauffage des piscines publiques, etc. Il y a de quoi faire puisque la production de chaleur génère 40 % des émissions mondiales de CO2.
De nombreux projets sont en cours, notamment dans les pays scandinaves :
Le grand avantage qu’ont les mineurs est de pouvoir s’installer quasiment n’importe où. Une connexion satellite Starlink suffit pour se connecter au réseau.
Cette agilité permet notamment de profiter du gaz quand il est un sous-produit de l’extraction pétrolière. Il s’agit d’un gaz qui serait autrement brûlé à la torche ou pire, relâché dans l’atmosphère faute de pouvoir l’acheminer jusqu’à la civilisation.
Ce méthane (CH4) est brûlé en CO₂ pour diminuer l’effet de serre. Le CO₂ est en effet 80 fois moins impactant que le méthane sur une période de 20 ans. Cependant, le taux de combustion est souvent plus proche de 90 % que de 100 %, pour diverses raisons comme le vent.
L’alternative est de convertir le gaz en électricité pour alimenter les machines des mineurs de bitcoin. La combustion est alors proche de 99,9 %. Déployer systématiquement des mineurs de BTC permettrait de lutter contre le réchauffement climatique puisque 140 milliards de mètres cubes de gaz naturel sont torchés chaque année (357 MtCO₂e).
D’après le rapport, 3,3 % de l’électricité consommée par les mineurs provient de ce type de gaz. Dit autrement, la part des énergies durables consommée par le réseau Bitcoin n’est pas de 52,4 %, mais plutôt de 55,7 %.
Que font les mineurs de BTC exactement ?
Si vous êtes encore là, c’est que le sujet vous intéresse particulièrement. Cours de rattrapage :
Il est utile pour bien se représenter les choses de séparer le réseau Bitcoin en deux. D’un côté les transactions, et de l’autre le travail des mineurs.
La cryptographie est toutefois la pierre angulaire de l’ensemble. Un wallet n’est pas grand-chose d’autre qu’une paire de clés privée et publique. On parle dans le jargon de cryptographie à clé publique (ou « asymétrique »).
En clair, les bitcoins (des chiffres…) sont « accrochés » à des clés publiques générées à partir d’une clé privée. On appelle communément ces clés publiques des « adresses bitcoin » qui servent à recevoir des bitcoins. Seules les clés privées correspondantes permettent de déplacer des bitcoins vers une autre clé publique, aka réaliser une transaction.
Ces transactions sont rassemblées dans des blocs « minés » toutes les dix minutes en moyenne. Ce processus (Proof of Work) est l’autre grand versant du réseau Bitcoin. Il nécessite d’importantes ressources informatiques qui protègent le réseau contre les attaques de type « Sybil ».
Le PoW demande de lourds investissements dans des ASIC qui ne peuvent pas servir à autre chose que de miner des bitcoins. Une attaque contre le bitcoin est donc économiquement irréalisable puisqu’elle coûterait des milliards de dollars.
Toujours là ? Alors allons plus loin.
Un bloc se constitue d’un en-tête contenant quelques données essentielles comme le hash du bloc précédent (d’où l’expression blockCHAIN), un horodatage, un nonce, la racine de l’arbre de Merkle, etc. Et puis, évidemment, quelques milliers de transactions.
Rendez-vous sur cet article pour une description complète : Bitcoin – Que trouve-t-on dans un « bloc » ?
Proof of Work
Le PoW consiste à faire varier frénétiquement un nonce (c’est-à-dire un nombre arbitraire) qui, une fois haché par l’algorithme cryptographique SHA-256 avec l’en-tête du bloc, produit un hash.
Ce hash est concrètement un nombre. « Miner un bloc » signifie trouver un hash inférieur à un nombre cible par essais et erreurs. La cible est ajustée en permanence pour maintenir le rythme d’un bloc toutes les dix minutes environ.
Il faut en moyenne 480 000 milliards de milliards d’essais pour miner un bloc et recevoir la récompense de 3.125 BTC. C’est un nombre gigantesque qui représente près de 70 fois le nombre de grains de sable dans le désert du Sahara. Ou encore sept fois le nombre estimé d’étoiles dans l’univers observable.
Une fois le hash trouvé, les nœuds vérifient qu’il respecte toutes les règles du protocole. Dans le cas contraire, le bloc est rejeté et le mineur perd de l’argent.
Ces règles incluent, sans s’y limiter, que le hash du bloc soit inférieur à la valeur cible; que toutes les transactions soient valides; que le montant de la récompense versée au mineur soit exact; que l’en-tête contienne le hash du bloc précédent, etc.
Terminons avec quelques informations glanées dans le rapport de Cambridge à propos des fabricants d’ASIC. Les trois principaux (Bitmain, MicroBT et Canaan) contrôlent 99 % du marché. Bitmain construit à lui seul 82 % des ASIC.
Nous y apprenons également qu’en juin 2024, l’efficience moyenne des ASIC à l’échelle de l’industrie était estimée à 28,2 J/TH. Soit une amélioration de 24 % d’une année sur l’autre.
Bitcoin, la prochaine monnaie de réserve internationale
Au-delà des réponses apportées à certains problèmes énergétiques et environnementaux, l’apatride bitcoin est surtout une monnaie de réserve en puissance. D’après Vaneck, la Chine et la Russie ont commencé à régler une fraction de leurs transactions en Bitcoin…
Le PDG de BlackRock n’a pas dit autre chose dans sa lettre annuelle aux investisseurs. Larry Fink pense que le dollar perdra le statut de monnaie de réserve mondiale au profit du bitcoin si les États-Unis ne résorbent pas leur déficit budgétaire.
À ce titre, la société d’investissement international VanEck a fait des petits calculs. Acheter un million de bitcoins permettrait aux États-Unis de réduire la dette publique américaine de 35 % d’ici 2049.
Le plus grand mineur russe, Bitriver, estime que dans ce contexte, « le développement de l’industrie minière est stratégiquement important pour les grandes puissances financières mondiales, y compris la Russie ».
L’oncle Sam se mettra très probablement à accumuler des bitcoins avant la fin de l’année. Il ne reste plus beaucoup de temps pour en accumuler avant que les nations du monde entier entrent dans la course…
Ne manquez pas notre article sur ce sujet : Les USA prêts à abandonner le « privilège exorbitant » pour le Bitcoin ?
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Reporting on Bitcoin and geopolitics.
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