Le FMI voit le dollar faire place à d'autres monnaies de réserve

Le FMI avoue que les tensions géopolitiques sont de mauvais augure pour le dollar. Les BRICS veulent couper les ponts. Pourquoi pas adopter le Bitcoin ?

Dollar et géopolitique

La guerre en Ukraine n’est que la partie émergée de l’iceberg. Les BRICS veulent refonder l’ordre monétaire international, ce qui irrite passablement Washington.

La vice-présidente du FMI Gita Gopinath l’a concédé à demi-mot dans un papier intitulé « Impact de la géopolitique sur le commerce international et le dollar ». Elle y déclare qu’il faut remonter à l’époque de la guerre froide pour observer une telle bascule des liens économiques globaux.

« Les pays réévaluent leurs partenaires commerciaux en fonction de leurs préoccupations économiques et sécuritaires. Les flux d’investissements à l’étranger sont également réorientés en fonction des alliances géopolitiques. Certains pays réévaluent leur forte dépendance à l’égard du dollar dans leurs transactions internationales et leurs réserves », a-t-elle lancé.

Le ministre des Affaires étrangères indien ne dira pas le contraire. Pour Subrahmanyam Jaishankar, « la domination des États-Unis, qui a commencé après la fin de la guerre froide, a pris fin » :

“The dominance of the United States, which started after the end of the Cold War, has effectively come to an end”

— India’s Foreign Minister, Jaishankar. pic.twitter.com/LrfOjwHGbk

— S.L. Kanthan (@Kanthan2030) May 13, 2024

Cela dit, malgré l’augmentation des risques géopolitiques, le dollar reste dominant. « Probablement parce qu’une grande partie du commerce des matières premières continue se facture et se règle en dollars », déclare Gita Gopinath. #pétrodollar…

Le billet vert représente aussi 58 % des réserves de change. La tendance est toutefois lourdement à la baisse. La part des avoirs de la Chine en bons du Trésor américain est par exemple passée entre 2015 et 2023 « de 44 % à 30 % de ses réserves de change ».

Pour être plus précis, les réserves chinoises en bons du Trésor US sont passées de 1 200 milliards de dollars en 2018 à 775 $ aujourd’hui (-35 %).

Gold Standard…

L’évolution récente la plus notable dans les réserves de change mondiales est l’augmentation des achats d’or par les banques centrales.

« L’or est généralement considéré comme un actif politiquement neutre pouvant être stocké à domicile, ce qui le protège des sanctions ou des saisies. Il peut également servir de couverture contre l’inflation, mais ne peut pas être facilement utilisé dans les transactions », peut-on lire dans le papier.

Si la fragmentation s’accentue, le FMI prévient que le « système de paiement mondial pourrait se fragmenter selon des alliances géopolitiques qui feront émerger de nouveaux systèmes de paiement à l’interopérabilité limitée ou inexistante. En outre, les réserves de change pourraient évoluer pour refléter les nouveaux liens économiques et les risques géopolitiques ».

La vice-présidente du FMI estime toutefois qu’un « système mondial comportant plusieurs monnaies de réserve pourrait présenter plusieurs avantages, notamment la diversification des réserves de change ».

Enfin, Gita Gopinath n’a pas oublié de mentionner que de nombreux pays suivent de près les discussions en cours sur l’utilisation potentielle des réserves en euros de l’État russe pour soutenir l’Ukraine. Pour elle, il est important que « toute action repose sur des bases juridiques suffisantes et ne compromette pas le fonctionnement du système monétaire international ».

Dit autrement, le FMI prévient que saisir les 220 milliards d’euros de réserves russes (+ 6 milliards de dollars et 40 milliards $ en yen, francs, etc..) serait ouvrir une boite de Pandore.

Il est certain que la Chine et l’Arabie saoudite s’inquièteront d’être les prochains sur la liste. Ce serait la fin de la globalisation et le début d’une ère extrêmement inflationniste. A ce propos, ne manquez pas notre article : Bitcoin et l’inflation sans fin.

BRICS et Bitcoin

L’analyse de Gita Gopinath rappelle celle de Bruno Martarello De Conti. Le professeur brésilien prévient que militariser la monnaie est un jeu dangereux.

« Nous savons tous que le dollar est utilisé comme une arme. Le système monétaire et financier international est totalement dysfonctionnel. C’est un problème pour la Russie, mais aussi pour le reste du monde », a-t-il déclaré au micro de Sputnik :

Bruno Martarello De Conti of the University of Campinas – importance of BRICS amid the dysfunctionality of the current international monetary and financial system, particularly the dominance of the US$ and its use as a geopolitical weapon. pic.twitter.com/CeRJnPNmFQ

— T.P. (@TP47149373) March 3, 2024

« Il est vraiment nécessaire que les BRICS construisent des alternatives au dollar. Par exemple via l’utilisation de monnaies locales pour le commerce bilatéral. C’est ce que fait la Russie avec la Chine. Développer une sorte de monnaie commune est également une bonne idée. C’est un projet complexe qui n’est pas pour tout de suite, mais il faut en discuter ».

La création d’un nouveau système de paiement est tout autant importante. Pour le professeur, « le système de paiement SWIFT est pareillement utilisé comme une arme ».

A ce titre, Sputnik a récemment relayé un peu vite le projet « Unit », présenté comme une « forme de monnaie apolitique influencée par aucun agenda politique ».

Nous pouvons également lire sur leur site :

« Actuellement, les BRICS ne sont pas prêts à lancer leur propre monnaie. Le besoin d’un système financier et monétaire international indépendant et fiable est néanmoins urgent. L’écosystème UNIT offre aux pays BRICS+ un cadre unique, qui peut pleinement prendre en compte les échanges entre blocs.

L’UNIT (token) est une unité de compte de l’écosystème UNIT. Elle représente une part proportionnelle du panier UNIT sous-jacent, qui contient 40 % d’or et de monnaies locales. »

Soyons sérieux. Il existe déjà des milliers de shitcoins… Le bitcoin ne s’invente qu’une fois. Il est la monnaie en même temps que le système de paiement (deux-en-un) rêvé par les BRICS. Pourquoi chercher midi à quatorze heures ?

Véritablement apatride et non censurable, le bitcoin est une solution ayant fait ses preuves depuis plus de 15 ans et prête à l’emploi