Le Brésil ne veut plus du dollar
Le président brésilien a lancé un message clair au reste du monde depuis la Chine : cessez d’utiliser le dollar américain et commercez dans vos propres monnaies.
Le Brésil s’émancipe du dollar
Luiz Inácio Lula da Silva a défié l’empire dès sa première visite d’État en Chine. Le brésilien veut une monnaie internationale alternative au dollar.
« Tous les soirs, je me demande pourquoi tous les échanges commerciaux doivent se faire en dollar », a-t-il déclaré au cours d’un discours passionné au siège de la Nouvelle banque de développement de Shanghai, aussi appelée « Banque des BRICS ».
« Qui a décidé que le dollar serait la monnaie internationale après la disparition de l’étalon-or ? Pourquoi ne pouvons-nous pas commercer sur la base de nos propres monnaies ? », a-t-il ajouté, suscitant des tonnerres d’applaudissements.
Pour Lula, la Banque des BRICS, présidée par l’ancienne présidente brésilienne Dilma Rousseff, doit remplacer le Fonds monétaire international et lancer une monnaie internationale alternative.
Le président brésilien a fustigé le FMI en dénonçant les conditions de prêts accordés à l’Argentine :
« Aucune banque ne devrait asphyxier les économies des pays comme le fait actuellement le FMI avec l’Argentine. Ou comme il l’a fait pendant longtemps avec le Brésil et tous les pays du tiers-monde. »
« Pourquoi une banque comme celle des BRICS ne pourrait-elle pas avoir une monnaie pour financer les relations commerciales entre le Brésil et la Chine, entre le Brésil et d’autres pays ? C’est difficile parce que nous ne sommes pas habitués [à cette idée]. Tout le monde dépend d’une seule monnaie, le dollar. »
L’appel de Lula coïncide avec les efforts croissants déployés par le tango sino-russe pour se débarrasser du billet vert.
BRICS > G7
Que le Brésil et la Chine décident de commercer dans leurs monnaies est naturel. Leurs échanges annuels atteignent 172 milliards de dollars. De quoi largement mettre en place un taux de change direct entre le real et le yuan, sans passer par l’étalon dollar.
Il faut bien comprendre que le PIB des BRICS dépasse celui du G7 (USA, Japon, France, UK, Italie, Allemagne, Canada) à parité de pouvoir d’achat. Soit 40 % de la population et 31 % du PIB contre 10 % et 30 % respectivement pour le G7.
Les économistes comparent les PIB « à parité de pouvoir d’achat » pour éviter de déformer la réalité. Ils appliquent un taux de change qui égalise le coût de la vie. La raison étant qu’un dollar converti en yuan permet d’acheter beaucoup plus de choses à Shanghai qu’à Washington.
À ce compte-là, l’Empire du Milieu est déjà la première puissance économique mondiale. Plus préoccupant pour l’Occident encore, les BRICS ne sont pas seuls !
Plus de 20 pays veulent rejoindre le club depuis que ce dernier affiche son ambition de créer une nouvelle monnaie de réserve. Et non des moindres.
L’Arabie Saoudite, les Émirats arabes unis et l’Iran sont sur le pas de la porte. Soit 31 % des réserves de pétrole et 25 % des réserves de gaz (50 % avec la Russie). Mais aussi d’autres poids lourds comme la Turquie, l’Indonésie ou le Mexique.
Et n’oublions pas les nouvelles routes de la soie. Ce projet pharaonique connecte 65 pays dont les sous-sols contiennent la majeure partie des ressources énergétiques connues.
Le dollar de trop
La fronde globale est la conséquence de la dévaluation de 2008 (Quantitative Easing, aka planche à billets). Ce n’est pas pour rien si la Chine accumule du métal jaune depuis lors.
En 2014, la Chine a encore durci le ton en cessant d’accumuler des réserves de change en dollar. Aujourd’hui, Pékin ne détient même plus 5 % de la dette publique américaine.
Le récent gel des 300 milliards de dollars et d’euros appartenant à la banque centrale russe a fait déborder le vase. Le monde réalise qu’il est extrêmement risqué de détenir des dollars.
Surtout qu’il devient très clair que les États-Unis ne rembourseront pas leurs dettes. Les politiciens américains ont plus d’une fois menacé l’Arabie saoudite et la Chine de s’asseoir sur leurs dollars…
Voyez ci-dessous l’allure du déficit budgétaire américain. Déjà près de 700 milliards de déficit en un seul trimestre :
Les nations sont fatiguées de cette aide inversée au profit de l’oncle Sam. Plus elles accumulent des réserves en dollar et plus les États-Unis peuvent s’endetter à leur dépends. Cela leur permet d’afficher une balance commerciale déficitaire sans que le dollar s’écroule.
Tel est le privilège exorbitant. Dette contre matières premières tangibles…
D’où la décision des BRICS de commercer dans leurs propres monnaies. Prochaine étape : trouver une nouvelle réserve de valeur pour stocker les excédents commerciaux.
Bitcoin comme monnaie de réserve internationale
Il se dit que les BRICS annonceront leur nouvelle monnaie de réserve lors de leur prochain sommet qui se déroulera cet été en Afrique du Sud.
Le flou demeure pour l’instant sur sa mouture. S’agira-t-il d’un panier de monnaie similaire au DTS du FMI ? Une monnaie adossée à des matières premières ? Ou bien tout simplement un retour du Gold Standard ? Ou un mix des trois ?
Malheureusement, comme pour le Gold Standard, une telle monnaie reposera sur une confiance qui, tôt ou tard, sera inévitablement rompue par le Nixon chinois…
En outre, est-ce qu’une monnaie adossée à de la dette est souhaitable comme réserve de valeur ? Quel pays sera intéressé par un panier de monnaies de pays affichant des taux d’inflation pouvant dépasser les 10 % par an ?
Non, la prochaine monnaie internationale devra avoir une valeur intrinsèque. Elle devra de surcroît facilement se transférer. Cette percée technologique se nomme Bitcoin, la première unité numérique impossible à dupliquer.
Les États-Unis n’accepteront pas une monnaie qui avantagerait d’autres nations. L’apatride bitcoin, avec ses transactions non censurables, apporte une solution élégante pour commercer à armes égales.
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