La valeur extractible maximale (MEV) au cœur des tensions entre l'UE et le secteur crypto

L’Autorité Européenne des marchés financiers (ESMA) a récemment signalé que la réorganisation des transactions blockchain pour maximiser les profits, connue sous le nom de valeur extractible maximale (MEV), pourrait constituer une forme d’abus de marché selon la loi MiCA. Cependant, certains experts de l’industrie crypto appellent à nuancer cette position.

La position de l’ESMA sur le MEV dans le cadre de MiCA

Dans ses dernières propositions réglementaires liées à la loi MiCA sur les actifs crypto, l’ESMA exprime ses inquiétudes concernant la MEV (ou Maximum Extractable Value). L’autorité de régulation assimile à des abus de marché les stratégies par lesquelles les opérateurs de blockchain réorganisent les transactions des utilisateurs dans le but d’optimiser leurs propres profits.

Ces tactiques, comme le Frontrunning ou les attaques en sandwich, peuvent effectivement réduire les gains des utilisateurs finaux, agissant comme une « taxe invisible ». L’ESMA souligne que MiCA étend les règles existantes de l’UE en matière d’abus de marché pour inclure les activités suspectes liées non seulement aux transactions, mais aussi au fonctionnement même de la blockchain.

Bien que le texte de MiCA ne mentionne pas explicitement le MEV, l’ESMA estime qu’il relève du champ d’application de cette loi. Peter Kerstens, conseiller à la Commission Européenne, reconnaît que le MEV peut soulever des questions d’intégrité du marché et déclencher des abus comme le Frontrunning.

La position nuancée de l’industrie crypto sur le MEV

En réaction à la position de l’ESMA, plusieurs acteurs de l’industrie crypto préconisent une approche plus nuancée. Anja Blaj, experte politique à l’European Crypto Initiative (EUCI), soutient qu’il faut cesser d’assimiler le MEV à une pratique négative. Elle argue qu’en réalité, seule une minorité de scénarios constituent de véritables abus de marché

Elle souligne que le MEV vise avant tout à récompenser les validateurs pour leur travail essentiel au fonctionnement de la blockchain. L’EUCI met en garde contre une potentielle surréglementation si MiCA était appliqué de manière trop large au MEV.

Les experts de l’industrie demandent donc à l’ESMA de clarifier précisément les scénarios de MEV qui constitueraient des abus de marché, ainsi que les responsabilités en cas de pratiques malveillantes avérées.

La consultation publique menée actuellement par l’AEMF devrait permettre de préciser prochainement la position officielle du régulateur sur le sujet complexe et clivant de la MEV. Les acteurs du secteur ont jusqu’au 25 juin pour faire entendre leur voix.