Taux directeur à 21 % : la Russie fait un pari risqué contre l’inflation 

Hier, vendredi, la Banque centrale russe a relevé son taux directeur à 21 %, un niveau historique qui n’avait plus été atteint depuis 2003. Derrière cette décision drastique se cache une tentative de contrer une inflation importante, alimentée par des dépenses militaires sans précédent et une économie en pleine mutation à cause des sanctions internationales. Pour Moscou, l’heure est à la lutte contre la spirale inflationniste, tandis que les entreprises et le marché russe redoutent les répercussions de cette politique monétaire.

Une politique monétaire en réponse à l’inflation incontrôlée

La Banque centrale russe (BCR) a annoncé ce vendredi 25 octobre 2024 un relèvement brutal de son taux directeur de 19 % à 21 %, un record depuis 2003. Ce nouveau tour de vis monétaire vise à « assurer le retour de l’inflation à l’objectif de 4 % » explique le communiqué officiel de la BCR. Avec une inflation à 8,63 % en septembre, bien au-delà des prévisions, cette décision était pressentie par de nombreux observateurs, mais son ampleur en a surpris plus d’un. Pour rappel, la BCR avait déjà relevé son taux de 18 % à 19 % en septembre pour tenter de freiner l’inflation, sans succès immédiat.

Cette montée des prix, largement alimentée par les dépenses publiques massives liées à l’effort de guerre en Ukraine, continue de peser sur l’économie russe. Depuis 2021, le budget fédéral a explosé, avec une augmentation de près de 50 %, principalement pour financer les dépenses militaires. En 2025, le budget de la Défense devrait encore bondir de 30 %, avec 13 500 milliards de roubles, soit environ 130 milliards d’euros. La Banque centrale pointe directement ces dépenses comme un facteur de l’inflation persistante, dans un cycle qui semble pour l’instant difficile à enrayer.

Les répercussions économiques et les défis à venir

Cette hausse soudaine du taux directeur suscite de vives inquiétudes parmi les chefs d’entreprise en Russie. Le coût élevé des emprunts bancaires, déjà pointé du doigt ces dernières semaines, risque de peser encore plus lourdement sur les investissements, particulièrement dans les secteurs non liés à l’industrie militaire. Nombre d’entreprises peinent à financer leurs projets, ce qui freine ainsi la croissance économique. « Le resserrement monétaire ralentit les investissements et la consommation », confirment plusieurs dirigeants d’entreprises dans un rapport de l’agence Rosstat.

Par ailleurs, la réorientation massive de l’économie russe vers l’effort de guerre entraîne des pénuries de main-d’œuvre dans plusieurs secteurs clés. La mobilisation de centaines de milliers d’hommes pour le front, ainsi que l’exode d’une partie de la population, limitent les capacités de production du pays. Ce cocktail explosif d’inflation et de pénurie de main-d’œuvre menace à terme de plonger la Russie dans une période de stagflation, où la croissance économique reste faible tandis que les prix continuent de grimper.

La décision de la Banque centrale russe d’augmenter son taux directeur à 21 % est un pari risqué. Si elle vise à freiner l’inflation, elle risque aussi d’étrangler les secteurs non militaires de l’économie et de ralentir la croissance. Le contexte reste marqué par des incertitudes majeures, notamment l’issue du conflit en Ukraine et l’impact des sanctions occidentales. À moyen terme, la Russie pourrait se retrouver encore plus tributaire de ses dépenses militaires, ce qui alimente ainsi une spirale inflationniste difficile à contenir. L’avenir économique du pays s’annonce donc sombre, avec peu de signaux de stabilisation à l’horizon. Il ne serait pas étonnant que de nombreuses entreprises russes se tournent vers des solutions comme les investissements dans les cryptos, en particulier le Bitcoin.