Interview Guillaume Ballet : Le métier de Core Developer pour Ethereum
Être Core Developer pour Ethereum est une expérience exigeante et passionnante, comme l’a révélé notre entrevue avec Guillaume Ballet, Core Developer sur Ethereum. Dans un écosystème mondial hyper-décentralisé, les Core Developers sont immergés dans une communauté ouverte, où chaque voix compte.
Pouvez-vous décrire ce qu’est d’être Core Developer pour Ethereum ?
C’est simple, c’est le travail de ma vie. Nous faisons partie d’une communauté mondiale, décentralisée, où chaque membre a son mot à dire. La communication se fait principalement à travers les Pool Requests sur GitHub lorsqu’on souhaite apporter des changements ou ajouter de nouvelles fonctionnalités. Le processus est très horizontal, mais aussi très challengeant du point de vue de la directive. Il faut chercher l’information partout et rester ouvert aux innovations permanentes, car il y a toujours de nouvelles idées. Cependant, il est crucial de ne pas s’attacher excessivement à une idée, car il y en a trop pour pouvoir toutes les réaliser.
Côté rencontre, nous essayons de nous réunir tous les 3-6 mois en fonction des évènements et de nos disponibilités. Il y a tellement d’évènement qu’on pourrait y être toutes les 2 semaines, mais il est plus intéressant d’espacer ces rencontres tout en se concentrant sur les moments importants. ETHCC est l’un de ces lieux de rencontre très important pour les développeurs, même si nous voyons que la partie business se développe de plus en plus, il reste de nombreux side-events dédiés aux développeurs, parfait pour discuter. Retrouvez notre article live au sujet de l’ETHCC 6.
Comment se passe le développement et notamment le respect de la nouvelle roadmap mise en avant par la Fondation ?
Le développement sur Ethereum est un processus collaboratif. Nous nous réunissons toutes les semaines lors de meetings, appelé les Ethereum All Core Developers, ou ACD pour discuter des nouvelles propositions, appelées Ethereum Improvement Proposals (EIP), qui sont l’équivalent des BIP de Bitcoin.
Les décisions concernant les implémentations sont prises en groupe, avec différents groupes tels que GETH, Lighthouse et Nethermind, qui décident d’implémenter en fonction de leur importance perçue.
L’idée est de ne pas se fermer aux nouvelles idées, car la blockchain doit évoluer pour faire face à tous les défis futurs. Il y a environ 200 Core Developers sur Ethereum, et en fonction du sujet de discussions aux ACD le nombre de développeurs présent peut varier, Vitalik et son équipe se joignent aussi de temps en temps aux ACD pour discuter avec nous, il n’y a pas de rapport de force.
La roadmap de développement, établie par l’Ethereum Foundation, est un outil essentiel pour coordonner nos efforts. Elle est régulièrement mise à jour par des contributeurs, y compris Vitalik, le co-fondateur d’Ethereum. Les décisions ne sont pas prises de manière centralisée, et le processus implique des débats animés entre les idées et les implémentations. Parfois, des changements radicaux peuvent s’imposer pour améliorer l’expérience utilisateur, mais cela peut entraîner des conflits avec des modèles commerciaux établis.
Quels sont les prochains grands défis pour les Core Developer et la blockchain Ethereum ?
L’un des principaux défis auxquels nous sommes confrontés est la scalabilité d’Ethereum. Le succès massif de la blockchain a entraîné une demande croissante en ressources informatiques, ce qui peut entraver ses performances.
Par exemple, la Binance Smart Chain (BSC), a connu des problèmes de scalabilité et va devoir faire des modifications pour y faire face dans le futur. Il y a une forte pression pour augmenter la limite du gaz pour accueillir plus de transactions, mais nous devons également faire attention à ne pas compromettre la stabilité et la sécurité du système. Le gaz est un marché, il est donc impossible d’augmenter ses limites sans conséquences sur le reste de l’économie d’Ethereum.
Nous travaillons également sur des solutions de Layer2 pour rendre Ethereum moins cher et plus accessible. Le « Proto Danksharding » permettra de diviser le gaz en deux types : le gaz généraliste et le gaz data. Le premier sera utilisé pour les transactions courantes, tandis que le second sera destiné aux Layer2 qui stockent leurs données. Cela permettra une comptabilité plus fine et des coûts plus justes pour les utilisateurs.
Enfin, nous travaillons sur la transition vers le « verge« , qui rendra Ethereum stateless en changeant le format des blocs et en ajoutant des preuves d’état. Cela permettra de charger un bloc sans avoir besoin de télécharger tous les blocs précédents. À terme, cela pourrait permettre de stocker Ethereum sur un téléphone mobile. Pour en savoir plus sur « the verge », vous pouvez revoir la conférence de Guillaume à l’ETHCC 6.
Ethereum est victime de son succès et chaque changement va provoquer de nombreuses réactions, entre les pressions financières, business et de développement, il faut trouver un équilibre pour garantir que la blockchain Ethereum sera encore là dans 100 ans.
Pourquoi travailler sur Ethereum et pas sur Bitcoin ?
L’innovation est un élément clé de notre motivation pour travailler sur Ethereum. Beaucoup d’innovations sont apparues sur cette blockchain, et de nombreux développeurs talentueux ont choisi de s’y investir, y compris Vitalik, le co-fondateur d’Ethereum. L’aspect décentralisé d’Ethereum permet plus de flexibilité et d’évolution que ce qui est possible sur Bitcoin, dont la vision initiale est parfois perçue comme trop rigide et maximaliste. Ethereum offre également des opportunités d’expérimentation, ce qui nous permet d’être à l’avant-garde des nouvelles technologies et des solutions potentielles pour les problèmes futurs.
On peut remarquer que de nombreuses innovations sur BTC ne proviennent pas du Bitcoin mais sont des modifications d’innovations présentes sur Ethereum.
Pour vous, qu’est-ce qu’Ethereum représente dans le futur ?
Je crois dans une blockchain qui sera là dans 50-100 ans, et c’est ce qui me fait travailler tard le soir et me donne confiance dans notre projet.
Pour moi, Ethereum est bien plus qu’une simple technologie. Je crois que dans le futur, Ethereum continuera à exister comme un medium d’échange et un instrument de paix. Il permettra des échanges sans barrières artificielles, comme des frontières ou des systèmes bancaires fermés. La possibilité de communiquer avec des personnes que je n’aurais jamais pu rencontrer dans ma vie est particulièrement enthousiasmante. Je crois que l’Ethereum jouera un rôle crucial dans l’amélioration de l’économie mondiale, notamment en aidant à résoudre les problèmes de développement économique, surtout dans des régions comme l’Afrique où les barrières économiques entravent le progrès.
La décentralisation d’Ethereum offre une stabilité et une sécurité inégalées, ce qui en fait un moteur pour des solutions économiques plus durables et équitables.
En somme, Ethereum est une force motrice du changement, et je suis convaincu qu’il continuera à jouer un rôle essentiel dans l’avenir, au-delà de nos vies individuelles. C’est ce qui me motive à travailler tard le soir et à consacrer ma vie professionnelle à cette technologie révolutionnaire. Afin d’en savoir plus sur la vie d’un core développeur Ethereum, Guillaume Ballet tient un podcast disponible sur toutes les plateformes classiques : Ethplorateurs, n’hésitez pas à y faire un tour !
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Observateur de la révolution monétaire, économique et sociale.
Les propos et opinions exprimés dans cet article n'engagent que leur auteur, et ne doivent pas être considérés comme des conseils en investissement. Effectuez vos propres recherches avant toute décision d'investissement.