De Bretton Woods au Bitcoin
Vladimir Poutine a récemment déclaré que « le système de Bretton Woods est mort ». Le monde a besoin d’une alternative et le Bitcoin apparait comme une évidence.
Monnaie impériale
L’hégémonie monétaire se maintient rarement plus de 100 ans. Le florin florentin, qui régna suprême au quatorzième siècle, sera finalement détrôné par le real portugais. Vinrent ensuite le real espagnol, le florin hollandais, la livre française, la livre sterling, et puis le dollar.
Voici une formidable infographie retraçant l’évolution de la part des différentes monnaies dans les réserves de change internationales depuis 1900 :
C’est à partir des années 1950 que le dollar supplanta définitivement la livre Sterling. La passation de pouvoir se déroula lors de la conférence de Bretton Woods. Les 40 nations alliées acceptèrent que le dollar devienne la pierre angulaire du système monétaire international.
Les États-Unis se trouvaient en effet en position de force vu que l’essentiel des réserves d’or mondiales se trouvaient à Fort Knox (près de 70 %). L’effort de guerre américain ne fut pas complètement gratuit… À ce titre, rappelons la fameuse déclaration du président Truman deux jours après l’invasion de l’Union soviétique par Hitler :
« Si nous voyons que l’Allemagne gagne, nous devons aider la Russie, et si la Russie gagne, nous devons aider l’Allemagne, et ainsi les laisser s’entre-tuer le plus possible, bien que je ne veuille en aucun cas voir Hitler victorieux. »
Bref… Le dollar, seule monnaie librement convertible en or, devint la monnaie de réserve internationale. On décida qu’une once d’or vaudrait 35 dollars et que tous les taux de change seraient fixes.
Cette convertibilité en or était une manière pour le vieux continent de s’assurer que les États-Unis ne financeraient pas leurs importations avec la planche à billets. Jusqu’à ce que…
1971
Le système de Bretton Woods s’effondra en 1971 lorsque le président Richard Nixon suspendit la conversion du dollar en or. Depuis, les taux de change « flottent ».
Le secrétaire du Trésor américain John Connally aura cette fameuse parole face une délégation européenne énervée : « Le dollar est notre monnaie, mais c’est votre problème ».
Cette décision fut prise pour deux raisons principales. La première est que les exportations européennes et japonaises étaient devenues plus compétitives dans les années 1960. Il en résulta une diminution de la part des États-Unis dans la production mondiale qui réduit les besoins en dollars. Les pays européens décidèrent donc de drainer le stock d’or américain qui passera de 20 000 à 8 000 tonnes.
Deuxièmement, Washington savait que le pic pétrolier national atteint en 1971 allait nettement aggraver son déficit commercial. Le prix du galon d’essence augmente de 20 % entre 1964 et 1970.
C’est alors que le secrétaire d’État Henry Kissinger orchestra le plus grand coup géopolitique des États-Unis : le pétrodollar. Rendez-vous sur cet article pour un récit de cette histoire fascinante.
L’histoire courte est que l’Arabie saoudite et les autres nations membres de l’OPEC furent forcées de vendre leur pétrole exclusivement en dollars. Si bien qu’en dépit de la fin du Gold Standard, toutes les nations industrialisées n’eurent d’autre choix que de conserver leurs réserves de change en dollars.
Cinquante ans plus tard, la monnaie américaine est de nouveau au cœur des tensions géopolitiques. Le président russe l’a encore souligné la semaine passée.
Pétrodollar, niet !
Vladimir Poutine a répété à l’occasion du Forum économique international de Saint-Pétersbourg que le monde a besoin d’un nouveau système monétaire international :
« Le système de Bretton Woods, basé sur l’étalon-or, est mort depuis longtemps. […] Les États-Unis l’ont abandonné pour le système consacré par les accords de la Jamaïque qui ont dissocié le dollar de l’or », a-t-il lancé.
« En fait, quelle est la base de ce système jamaïcain qui dure encore aujourd’hui ? La confiance dans l’économie américaine. Dans le système financier mondial actuel, il n’y a pas d’autre garantie, pour ainsi dire, que la confiance dans l’économie américaine ».
Le problème est que les Américains profitent énormément de la fin du Gold Standard. Pour le tsar russe, « les données publiques montrent que les États-Unis doivent environ 54 000 milliards de dollars au reste du monde ». Ce chiffre représente probablement le déficit extérieur cumulé des États-Unis.
L’existence de ce déficit extérieur massif tient au fait que les banques centrales gardent plusieurs milliers de milliards de dollars en réserve sous forme de bons du Trésor (dette publique). Ce sont autant de dollars qui ne sont pas convertis dans d’autres monnaies et qui supportent artificiellement la valeur du dollar. Et cela, malgré une balance commerciale chroniquement déficitaire. Seuls les États-Unis bénéficient d’un tel privilège.
Non seulement les États-Unis profitent du système, mais ils en abusent (déconnexion de pays entiers du réseau SWIFT, gel des réserves de change, etc). Entre la militarisation du dollar et les défauts de paiement (« gel »), il n’est pas surprenant de voir les BRICS faire de la dédollarisation une priorité.
De ce point de vue, la guerre en Ukraine peut être facilement perçue comme une tentative de déstabilisation de la Russie en vue de freiner la dédollarisation dont Moscou est le porte-étendard.
De Dexter White à Satoshi
Petit à petit, les BRICS substituent leurs monnaies nationales au dollar dans leurs échanges ainsi que dans leurs réserves de change. En 2023, la part de l’or (17,60 %) dans les réserves détenues par les banques centrales a dépassé celle de l’euro. La première place revient toujours au dollar, à 48 %.
[A noter que si l’Inde à récemment rapatrié 100 tonnes d’or de Londres, son voisin chinois a récemment cessé d’en acheter : Notre article à ce sujet]
Néanmoins, l’or n’est pas un système de paiement. Difficile d’envoyer des pépites par la poste. D’où l’intérêt des BRICS pour un système de paiement en CBDC. Le projet mBridge chapeauté par la Chine est probablement le plus avancé en tant qu’alternative au réseau SWIFT.
Mais pour être populaire, le système de paiement mBridge devra proposer des taux de conversion plus avantageux qu’avec le système actuel centré autour du billet vert. Ce sera très difficile. Il n’y aura pas de conversions directes entre le dong vietnamien et le soum ouzbek. Ce n’est pas réaliste. Il faudra des volumes importants, ce qui requiert un étalon. Le dollar joue actuellement ce rôle de pivot, mais quel sera-t-il dans le système des BRICS ?
Le yuan chinois ? L’Inde n’en voudra pas. L’or ? Problème, il ne voyage pas par internet. Nous en reviendrions à des promesses qui se termineront comme en 1971. En d’autres termes, Vladimir Poutine promet un système de paiement « à l’abri des pressions politiques, des abus et des sanctions extérieures », mais sera-t-il compétitif ?
Pourquoi ne pas adopter une solution ayant fait ses preuves depuis plus de 15 ans : le Bitcoin ? Monnaie apatride et non censurable, il est un système de paiement en même temps qu’un étalon monétaire, deux-en-un.
Le bitcoin est la solution parfaite au problème de réserve de valeur globale (masse monétaire absolument finie) et de système de paiement fiable. Il permettrait à toutes les nations de commercer à armes égales, ce dont nous avons absolument besoin pour apaiser les tensions géopolitiques.
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