Crypto : Monero (XMR) est-il le vrai bitcoin ?
Monero est une cryptomonnaie anonyme, intraçable et décentralisée. Une monnaie numérique qui ambitionne de sauvegarder l’utopie cypherpunk. L’authentique esprit de Bitcoin se trouve-t-il désormais du côté du XMR ?
Monero, une crypto qui crypte
Monero est une cryptomonnaie créée en 2014. Dès le départ, l’anonymat et la vie privée sont au centre des préoccupations de ses développeurs. La plupart anonymes, ils travaillent en tant que bénévole sur le projet. Comme Bitcoin, Monero n’a donc pas une personne identifiable à sa tête, ce qui donne moins de possibilités d’attaque sur son protocole ou sa gouvernance. À la manière du réseau Bitcoin, la blockchain de Monero évolue régulièrement. XMR s’inspire du code de Bitcoin, mais il s’agit bien d’un protocole unique avec son propre fonctionnement. C’est ce qu’on appelle un hard fork. Autrement dit, une bifurcation dans le code informatique, à partir d’un même point de départ (en l’occurrence, le protocole Bitcoin de 2014).
Techniquement, le XMR innove toutefois au niveau de la cryptographie en proposant une solution novatrice permettant de brouiller les pistes. À ce sujet, les soutiens du XMR citent souvent le lanceur d’alerte Edward Snowden : « Ne pas se soucier de l’anonymat parce que l’on n’a rien à cacher, c’est un peu comme ne pas se soucier de la liberté d’expression parce que l’on n’a rien à dire ».
Monero VS Bitcoin, la comparaison interdite
La nature de Bitcoin est souvent l’objet de fantasmes. Certains présentent parfois le BTC comme une monnaie anonyme, utilisée par des criminels pour faire des transactions en toute discrétion (ou plus récemment, par des spéculateurs avides de richesses et d’argent facile). En réalité, Bitcoin est traçable, puisque transparent : on peut littéralement lire dans sa blockchain comme dans un livre ouvert. Même si les adresses sont pseudonymes, il est possible de recouper les transactions entre différents portefeuilles afin d’identifier les propriétaires. C’est le principe d’un registre visible et consultable par tous. De plus, Bitcoin est projet open-source et collaboratif. Des qualités que l’on retrouve dans Monero, avec une différence de taille : le XMR n’est pas pseudonyme, mais anonyme. La nuance a son importance.
Alors que Bitcoin est traçable, Monero (ou plutôt ses développeurs) propose un algorithme particulièrement ingénieux. Un système complexe qui utilise la blockchain pour rendre l’échange de valeur impossible à relier à une adresse de portefeuille. Tout comme Bitcoin, il utilise un mécanisme de preuve de travail (proof-of-work) pour la validation des blocs. Le réseau Monero a pour l’instant résisté à toutes les menaces de sécurité. « Monero est ce que les néo-investisseurs en bitcoin pensent acheter » d’après Douglas Tuman, créateur du podcast « Monero Talks ». Une référence au célèbre Bitcoin Talks, forum qui a vu la naissance de bitcoin sous l’égide du mystérieux Satoshi Nakamoto, son inventeur. Un brin provocateur, il n’hésite pas à placer Monero devant Bitcoin. Pour lui, XMR est une sorte de bitcoin amélioré, puisqu’il est l’outil ultime pour préserver la vie privée.
La philosophie de l’anonymat pur
Le XMR est donc un peu au BTC ce que l’Église orthodoxe est au catholicisme : une vision plus « pure » de ce que doit être une cryptomonnaie sans intermédiaire. Mais entre BTC et XMR, il existe un fossé. XMR est moins spéculatif, même s’il est solidement installé dans le top 30 des cryptomonnaies avec la plus forte valorisation. Crypto historique de l’écosystème, elle intéresse moins les investisseurs. Le XMR n’a pas vocation à être un actif spéculatif. En achetant du Monero, on achète la possibilité d’échanger de la valeur de manière sécurisée et anonyme. La raison d’être du XMR étant précisément de pouvoir s’échanger directement en pair à pair, sans intermédiaire. Il existe d’ailleurs plusieurs marketplaces pour échanger des services ou des biens contre des XMR.
Monero reste un outil. En cela, il est susceptible d’être utilisé par un très large panel de sensibilités politiques différentes. Le sulfureux John McAfee, pionnier des solutions antivirus et d’internet, apportait par exemple son soutien au projet Monero. Cette cryptomonnaie est notamment plébiscitée par les libertariens (dit aussi « anarcho-capitalistes »). Ils prônent un état minimal, voire absent, avec le marché comme seul cadre. XMR est-il meilleur que BTC ? Peut-il un jour surclasser Bitcoin ? Si la question peut paraître absurde, Monero a pourtant de nombreux atouts à faire valoir.
Une communauté similaire à celle de Bitcoin à ses débuts
La communauté Monero rassemble de plus en plus d’adeptes. La lutte contre la surveillance réunie aujourd’hui un large panel de sensibilité politique. S’il est impossible de dresser une vraie sociologie, la communauté Monero compte spécifiquement des geeks et des nerds. Le nez dans le code, ils discutent des manières d’améliorer le protocole. Un code qui est d’ailleurs disponible en libre accès, puisque le projet est open source.
Avec Monero, c’est une sorte d’utopie anti-surveillance qui se perpétue. Digne héritière de la contre-culture cypherpunk, la crypto XMR prolonge une certaine vision de ce que doit être le web et le numérique. Vous pouvez retrouver cet article pour en apprendre plus sur le mouvement cypherpunk. Monero signifie d’ailleurs « pièce » en espéranto, la langue construite internationale. Une preuve de la vision no border des partisans de cette crypto. Comme Bitcoin à ses débuts, les personnes qui travaillent et font vivre le projet sont donc surtout des activistes de la vie privée. Quelquefois perçus comme une « secte », cela leur donne une certaine ressemblance avec les premiers utilisateurs du Bitcoin. D’autres personnes utilisent Monero non par principe, mais, car c’est parfois leur seul moyen de survie dans des pays soumis à la dictature. C’est le cas par exemple en Afghanistan.
Vie privée : vers l’interdiction de Monero ?
Aujourd’hui, Bitcoin est de moins en moins accusé de faciliter le terrorisme, le crime ou le blanchiment d’argent. On critique désormais davantage sa consommation d’énergie. Finalement, de moins en moins de personnes parlent d’interdire le bitcoin (un non-sens, au même titre que vouloir « interdire internet »).
Si Bitcoin n’est plus autant attaqué, c’est peut-être qu’il dérange moins, qu’il est moins subversif. On peut aussi penser les régulateurs et les décideurs monétaires sont confiants quant à leur capacité à récupérer le protocole. L’accumulation de Bitcoin dans les mains de gros fonds d’investissement ou la professionnalisation du minage peuvent par exemple alerter. Bien entendu, le BTC est toujours controversé, mais ce n’est plus la bête noire des institutions. Tout au plus, c’est un caillou dans la chaussure des banques qui n’aimeraient pas que leurs clients s’aperçoivent qu’un réseau décentralisé rend les intermédiaires bancaires complètement obsolètes…
Le XMR, lui, fait l’objet de critiques plus virulentes. Monero a véritablement le mauvais rôle dans l’écosystème crypto. Attaqué de toute part, il a l’audace de vouloir préserver la vie privée des citoyens, ainsi que l’anonymat de leurs transactions. Il est donc plus dangereux aux yeux des institutions et des pouvoirs centralisés. Son seul mérite est qu’il n’est pas aussi populaire que son homologue le BTC. Dernièrement, Monero connaît également un regain d’intérêt alors que l’affaire tornado cash éclate. En rendant illégale un code informatique, le législateur américain ouvrait une brèche dans la conception de la liberté et de la vie privée. Une cryptomonnaie totalement anonyme pourrait-elle subir le même sort ? Pour la communauté Monero, l’interdiction du XMR serait presque un aboutissement. Il prouverait ainsi sa nature réellement subversive. Surtout, interdire un phénomène décentralisé et spontané n’a jamais vraiment fonctionné. En France, la loi Hadopi en est une bonne illustration.
Conclusion
Bitcoin reste et restera la première cryptomonnaie, que ce soit en termes d’usage, de popularité, de valeur et de longévité. Mais l’authentique philosophie cypherpunk se prolonge peut-être davantage aujourd’hui avec Monero, qui compte de nombreux adeptes. Une communauté de marginaux, utopistes, geeks, anarchistes ou libertariens, mais aussi de personnes sensibles aux enjeux du droit à la vie privée et à l’anonymat.
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Les cryptomonnaies et le bitcoin constituent un phénomène culturel et politique à part entière. Du mouvement cypherpunk en passant par le crypto-art, je documente ces tendances qui repoussent toujours plus loin les frontières de l’économie traditionnelle.
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