Brave, un navigateur web 3.0 en perte de vitesse

Créé en 2016 par Bredan Eich, le fondateur de Firefox, Brave est un pionnier historique de la navigation web 3.0. Malgré des qualités indéniables, le navigateur et sa cryptomonnaie BAT stagne, et peine à se démarquer dans la course aux navigateurs de nouvelle génération. La faute à un marketing hasardeux et à une cryptomonnaie native peu utile.

Promesses non tenues

Malgré les qualités indiscutables du navigateur Brave, son bilan est aujourd’hui décevant. La faute aux nombreuses promesses qui n’ont pas été tenues. Sorti en 2016, Brave était en effet voué à être décentralisé, novateur, et devait révolutionner l’économie d’Internet avec sa cryptomonnaie, le BAT.

KYC obligatoire

Malgré ces promesses affichées de décentralisation, Brave oblige aujourd’hui ses utilisateurs à passer une vérification d’identité poussée pour avoir accès aux BAT. En pratique, il utilise même une solution tierce via la plateforme Gemini. Bien loin de ses aspirations de départ.
Sur le papier, l’idée de départ était pourtant séduisante : proposer sous forme de cryptomonnaie une part du gâteau des revenus publicitaires, en redistribuant la valeur générée par la navigation. En réalité, l’identification (KYC, know your customer) est une obligation légale de la part de l’entreprise qui édite le navigateur Brave. De quoi illustrer encore une fois l’utilité des réseaux réellement décentralisés. Car devoir se filmer afin d’accéder à ses BATs n’a rien de réjouissant. Le projet est ainsi aujourd’hui pris en étau entre la complexité des régulations et sa promesse de départ de respect de la privacy. Résultat : Brave ne comble ni l’un ni l’autre, et entretien un entre-deux particulièrement inconfortable.

Un écosystème qui stagne

En partie à cause de ce système, le navigateur peine à faire vivre son système circulaire d’économie du web 3.0. Certains utilisateurs se plaignent également d’une distribution aléatoire et peu transparente des récompenses en BAT, voire carrément de bugs de récompenses. Un très mauvais signal envoyé aux utilisateurs qui semble ne rien arranger à une situation déjà assez délicate. Sur Reddit la communauté r/brave compte de moins en moins de membres, tandis que de plus en plus d’internautes expriment leurs doutes sur le projet. Certains développeurs (les premiers à adopter Brave) se détournent même publiquement du browser à la tête de lion.

Pourtant, le navigateur vivait jusqu’à là une belle sucess story. Il était en effet passé de 5 millions d’utilisateurs en 2019 à plus de 50 millions en 2022 ! Le projet affichait jusqu’alors une croissance exponentielle. Une donnée qui laissait présager le meilleur, dans un écosystème particulièrement concurrentiel. Se tailler une place aux côtés de Microsoft (Bing) et de Google Chrome nécessite en effet une croissance rapide et un développement agressif. Fort de ces performances, Brave publiait chaque mois les chiffres du nombre de ses utilisateurs. Mais depuis 2022 la courbe stagne désespérément, voire plonge même certains mois. L’heure n’est plus à l’euphorie pour Brendan Eich. La baisse d’utilisateurs confirme ce constat : aujourd’hui, détenir du BAT semble avoir peu d’intérêt, en dehors de la spéculation pure.

Le BAT, une crypto décevante

Le prix du Basic Attention Token (BAT) au plus bas

Où est l’époque où chaque publicité reçue faisait gagner 0,1 BAT ? Désormais, il faut compter 0.002 BAT par pub. Pour ne rien arranger, le prix du BAT connaît une longue descente vers les abîmes. Avec une perte nette de 50 % en 1 an, le BAT dégringole inexorablement en dehors du top 100. Il y était pourtant solidement installé depuis le début de son existence. Il s’était notamment hissé à 1,60 $ le 29 novembre 2021, en plein bullrun. Un niveau qui semble bien loin aujourd’hui. À moins qu’un éventuel marché haussier pourrait redonner un second souffle au projet, en permettant enfin au BAT de devenir la pierre angulaire d’une nouvelle économie web 3.0 ? C’est ce qu’espèrent évidemment tous les holders de Basic Attention Token.

Brave, BAT, Basic attention token : un marketing bancal

En plus de ce contexte difficile, Brave souffre de ses errances au niveau du marketing. À première vue, le logo de Brave est séduisant : un lion impassible, qui inspire la confiance et la sérénité dans la jungle qu’est web. Les plus critiques souligneront sa ressemblance avec celui du roi du matelas. Pourtant, le problème n’est pas là. En réalité, Brave paraît avoir plusieurs logos, à l’image de ce triangle qui est l’emblème de la cryptomonnaie BAT, censé représenter l’économie web 3.0. Loin d’être un détail graphique, ces choix étrange porte préjudice au projet, mal identifiable.

Une concurrence web 3.0 de plus en plus rude

Microsoft n’est peut-être pas le premier nom qui vient à l’esprit en matière de blockchain. Pourtant, la société souhaite l’expérimenter via son navigateur Edge. Le géant américain annonçait récemment réfléchir à un wallet crypto compatible avec son produit D’autres, comme Opéra et son crypto browser, sont également dans la course. Toutes ces entreprises cherchent donc à concurrencer Brave dans la course au web 3.0. Une menace supplémentaire pour l’ambitieux projet du fondateur de Firefox.

Outre les mastodontes bien connus, d’autres petits navigateurs se lancent dans la course au web 3.0. L’un des plus intéressants est sans doute Decentr, un projet qui fonctionne déjà avec sa propre blockchain. Contrairement à Brave, le navigateur parvient à être décentralisé par défaut, dès le début, avec un token utilisé et réellement échangé au sein de l’écosystème Cosmos (ATOM).

Aujourd’hui, le projet semble se perdre entre plusieurs développements hasardeux : brave search, brave wallet, VPN… de quoi déconcerter les utilisateurs, qui aimeraient pouvoir compter sur une base solide, plutôt que de voir les fonctionnalités se multiplier.

Un navigateur loin d’être enterré

Malgré tout, Brave reste très performant dans le blocage des traceurs des sites web. Il permet notamment d’utiliser Tor, le réseau informatique anonyme, et ce, très facilement. De plus, aujourd’hui, les navigateurs web tendent à remplacer les traditionnels systèmes d’exploitation. Brave est donc la porte d’entrée parfaite pour l’adoption des cryptomonnaies que d’intégrer directement un portefeuille dans un navigateur. En travaillant activement sur les paiements intégrés au web, Brave pourrait favoriser l’adoption des cryptomonnaies s’il réussissait son pari.

Brave reste aujourd’hui à la pointe de la navigation nouvelle génération en garantissant le respect de la vie privée de ses utilisateurs. Sa mission principale accomplie, le navigateur peine maintenant à faire de son token une cryptomonnaie réellement utile au web 3.0.