Les mineurs américain invoquent le bitcoin face à la dédollarisation

Le bitcoin est de plus en plus perçu outre Atlantique comme une stratégie visant à contrer la défiance globale vis-à-vis du dollar.

Les mineurs entrent dans l’arène géopolitique

La récente lettre ouverte du PDG de Marathon (premier mineur de BTC américain) offre un contraste saisissant avec l’obscurantisme qui règne en Europe.

Cette lettre arrive dans un contexte particulier. La récente élection de Donald Trump a remis sa promesse de créer une réserve stratégique de bitcoins sur le devant de la scène. La sénatrice Cynthia Lummis propose dans son Bitcoin Act d’acquérir un million de bitcoins au cours des cinq prochaines années.

Alors que les spéculations vont bon train à propos de pays qui seraient en train d’accumuler des bitcoins avant les États-Unis, Fred Thiel recommande « d’agir rapidement pour s’assurer une position dominante ».

Sa description limpide de ce qui fait l’intérêt du bitcoin gagnerait à se répandre dans les médias français :

« La caractéristique unique du bitcoin est son offre fixe que garantit sa politique monétaire décentralisée. L’or est considéré de manière historique comme la première réserve de valeur, mais il est confronté à des défis croissants posés par l’ère numérique. Il est inefficace pour réaliser des transactions internationales. Cette limitation a progressivement écorné le statut de l’or.

[…]

A contrario, le bitcoin brille par sa capacité à transférer de la valeur non seulement dans le temps, mais aussi dans l’espace. Cet atout le rend attrayant en tant que réserve de valeur et moyen d’échange, en particulier pour les nations en quête de souveraineté financière. Le Bitcoin étant un actif plus rare et transférable que l’or, les États-Unis devraient prendre l’initiative d’en accumuler tout comme ils l’ont fait avec l’or.

[…]

Les États-Unis détiennent déjà un peu plus de 200 000 bitcoins, mais des pays comme la Chine, avec environ 190 000 bitcoins, ne sont pas loin derrière. Alors que de plus en plus de pays reconnaissent le potentiel du bitcoin en tant qu’actif de réserve, les États-Unis doivent prendre des mesures décisives pour conserver leur position de leader. »

https://twitter.com/TFTC21/status/1861505204006388041

Bitcoin pour contrer la dédollarisation

Avec lucidité, le mineur confesse que « le monde est témoin d’une tendance significative à la dédollarisation. Les nations se tournent de plus en plus vers des alternatives au dollar en raison de préoccupations liées à la politique monétaire et aux sanctions ».

En effet, les BRICS ne cachent plus ambition de se débarrasser graduellement du billet vert. De nombreux pays hésitent encore par peur des représailles américaines, mais cela ne durera pas indéfiniment.

Cela étant dit, les BRICS ne se sont toujours pas mis d’accord sur une nouvelle monnaie de réserve internationale. Pourtant, le bitcoin leur tend les bras. Les États-Unis l’ont compris et comptent bien prendre une longueur d’avance. Fred Thiel ne dit pas autre chose dans sa lettre :

« Cette tendance à la dédollarisation a de profondes implications. Le statut du dollar en tant que monnaie de réserve internationale pourrait s’affaiblir et entraver la capacité des États-Unis à financer leur dette croissante tout en provoquant une instabilité géopolitique. Sans investissement stratégique dans l’industrie du bitcoin, les États-Unis risquent d’amplifier ces défis et d’accélérer la perte de confiance quant à l’hégémonie du dollar. »

Concernant ces « investissements industriels », rappelons rapidement comment le réseau Bitcoin fonctionne. Les transactions sont diffusées dans ce que l’on appelle des « blocs ». Chacun de ces blocs peut contenir une quantité fixe de transactions. L’accès à ces blocs appartient aux mineurs qui contrôlent le « hashrate », c’est-à-dire la puissance de calcul nécessaire pour ajouter de nouveaux blocs à la « blockchain ».

Un pays ayant sur son territoire une part importante du hashrate est souverain en matière de transactions. Ce pays peut donner la priorité à certaines transactions et empêcher des pays adverses de censurer des transactions.

Un atout pour la transition énergétique

Au-delà de son importance géopolitique, le PDG de Marathon a aussi souligné que l’industrie du bitcoin renforce les secteurs de l’énergie et de la technologie.

« L’industrie du bitcoin encourage la fabrication nationale de puces électroniques ainsi que la production d’énergie. Sans investissement dans la production nationale de puces ASIC, les États-Unis resteront dépendants des fabricants étrangers [chinois], manquant ainsi l’occasion de créer une chaîne d’approvisionnement nationale robuste. »

Par ailleurs, les mineurs sont un client de choix pour les énergéticiens. Ils rentabilisent l’électricité excédentaire produite par les énergies renouvelables et intermittentes.

Plutôt que de brader la production électrique excédentaire en dehors des heures de pointes, les énergéticiens pourraient la vendre plus chère à des mineurs de bitcoins. Ces derniers peuvent en outre s’effacer pendant les pics de demande, ce qui permet de stabiliser le réseau électrique. L’État du Texas est déjà à la pointe dans ce domaine et l’on se demande ce que RTE et EDF attendent se pencher sérieusement sur le sujet.

Mieux encore, l’industrie du bitcoin permet de réduire les émissions de gaz à effet de serre. L’explication tient au fait que les champs pétrolifères extraient du pétrole, mais aussi du méthane qu’il est bien souvent non rentable d’acheminer jusqu’à la civilisation.

La conséquence est que ce gaz est brûlé sur place, dans des torchères. Malheureusement, une partie substantielle du méthane s’échappe (combustion incomplète à cause du vent).

Face à ce problème, les mineurs de bitcoins peuvent valoriser ce gaz pour miner. Ce faisant, ils brûlent entièrement le méthane en CO2, ce qui réduit sensiblement les rejets de CH4 dans l’atmosphère.
Il est grand temps que le vieux continent lève l’anathème, sous peine de subir le plus grand séisme monétaire depuis la fin des accords de Bretton Woods.

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