Bitcoin - Le jeu dangereux du mineur Marathon

Connu pour avoir censuré des transactions bitcoin en 2021, Marathon défraie de nouveau la chronique avec une attaque insidieuse contre ses concurrents.

Marathon mine la concurrence

Marathon – plus grand mineur américain – fait grincer des dents depuis le lancement de son service « Slipstream » qui rabote les revenus des autres mineurs.

Pour comprendre l’imbroglio, il faut rappeler que les mineurs ne construisent pas eux-mêmes les blocs de transactions. Ce sont en réalité les « pools » qui s’en chargent.

Les mineurs mettent en commun leur hashrate via des pools afin de lisser leurs revenus. Les grandes pools sont Foundry USA, Antpool, f2pool, viaBTC, Ocean, etc.

Toutes ces pools rétribuent leurs mineurs via un système appelé FPPS (Full paid per share). En essence, les mineurs sont payés pour chaque bloc, que la pool en ait trouvé un ou non.

Le calcul est basé sur une formule prenant en compte la récompense moyenne des derniers blocs. C’est-à-dire la récompense automatique de 6,25 bitcoins plus les frais de transaction.

Marathon a ça de particulier qu’il est assez gros (25 EH/s) pour avoir sa propre pool. Le problème étant qu’avec Slipstream, Marathon perçoit des frais de transaction mano à mano. Ces dernières ne sont donc pas prises en compte dans le calcul du système FPPS.

Slipstream est un service permettant d’insérer des inscriptions (comme des ordinals de 4 Mo) dans les transactions bitcoin. Voici le résultat :

This one shitbox of a pool Mara, essentially filtered over 1,000 monetary transactions in one block for this ordinal spam, which have always been considered an attack on bitcoin. Yet not a peep from the anti-filter crowd … 👂🦗https://t.co/B2f9GzJuva pic.twitter.com/lrp4W8IxhE

— Chester Copperpot (@Chester07752238) March 14, 2024

Les frais que Marathon reçoit pour insérer cet ordinal n’apparaissent pas dans les frais de transaction on chain. Ils ne peuvent donc pas être pris en compte dans le calcul FPPS. La conséquence et une meilleure rémunération de l’ensemble des pools au détriment des mineurs.

Dit autrement, Marathon met des bâtons dans les roues de ses concurrents et remet en cause la viabilité du système FPPS.

La fin du système FPPS ?

Le système FPPS est un argument de vente pour attirer les mineurs qui préfèrent recevoir leurs paiements le plus régulièrement possible. Mais il y a deux écueils.

Comme nous venons de l’expliquer, les pools peuvent sous-payer leurs mineurs et empocher la différence. Ce sera de plus en plus vrai à mesure que les frais de transaction représentent une part grandissante des revenus (en raison des halvings).

Le second problème est que les pools peuvent aussi surpayer les mineurs en cas de malchance. Le risque étant de se mettre en faillite.

Les pools comme Mara qui effectuent des transactions « off band » font le lit de la pool Ocean qui est la seule à ne pas utiliser le système FPPS. Les paiements sont moins réguliers, mais les mineurs reçoivent entièrement leur dû. Tout est transparent grâce aux paiements réalisés directement via la transaction « coinbase ».

En somme, Marathon sollicite des transactions que les nœuds ne veulent pas inclure dans les blocs. Ces transactions volumineuses requièrent en effet plus de mémoire et rallongent le temps d’IBD (Initial Blockchain Download).

Traiter les nœuds comme une ressource inépuisable dont on peut abuser revient à ne pas comprendre que le grand avantage du bitcoin face aux shitcoins est sa décentralisation. Or cette décentralisation dépend directement du nombre de noeuds.

Contourner les nœuds en refusant des transactions valides (OFAC), ou bien leur imposer des transactions indésirables (Slipstream), revient dans les deux cas à saper ce qui rend le Bitcoin unique.

Le pouvoir de sélectionner les transactions ne devrait pas appartenir à une poignée de pools. Il est grand temps de militer pour Stratum V2 afin de rendre aux mineurs la responsabilité de choisir les transactions.

La pool Ocean est la seule ayant annoncé son intention d’adopter le protocole Stratum V2 dès cette année.