Bitcoin (BTC) : La grande interview de Bruno Le Maire
Bruno le Maire a donné la primeur de sa « première grande interview » à BFM Crypto. Sortez les violons.
MiCado
Pour Bruno Le Maire, il ne faut « pas avoir peur de l’innovation et de la décentralisation ». « Nous voulons que la France soit le hub européen de l’écosystème des cryptoactifs », a-t-il claironné.
Le ministre des Finances prévient toutefois qu’il ne faudrait pas non plus « idolâtrer un monde sans État, sans banque centrale, sans frontières et finalement sans monnaie. ». « Cette idolâtrie conduirait à mettre en danger notre souveraineté, mais aussi et surtout, les plus fragiles d’entre nous. »
Tout va très bien, madame la marquise. N’allez donc pas poser des questions sur les milliers de milliards imprimés par la BCE. Ni sur l’inflation hors de contrôle qui, pourtant, est un transfert de richesses depuis les pauvres vers les riches.
Non. Réjouissez-vous plutôt que ce soit « sous la présidence française du Conseil de l’Union européenne que nous ayons trouvé un compromis politique ambitieux sur le règlement MiCa ». En outre, M. Le Maire s’est dit fier d’avoir attiré à Paris deux des plus grands exchanges mondiaux : Binance et Crypto.com.
Cela permettra toujours de créer quelques emplois dans les casinos de la crypto et d’engranger des rentrées fiscales. En parlant d’impôts, le cadre fiscal pour les plus-values devrait être clarifié en 2023.
Bientôt un rapport sur l’impact environnemental du bitcoin
Bruno le Maire a révélé que son ministère « rédige un rapport sur l’impact environnemental des cryptoactifs ». Il s’agira de regarder « comment le secteur peut réduire ses émissions, notamment en matière de mining ».
Malheureusement, le ministre s’est réjoui en parallèle « du passage d’Ethereum au proof-of-stake, bien moins consommateur d’énergie », démontrant par là qu’il ne maîtrise pas son sujet.
Ce faux pas n’a pas échappé au mineur Sébastien Gouspillou :
Oui, le bitcoin consomme de l’énergie. Mais c’est heureux ! Le bitcoin est la seule technologie permettant de gagner de l’argent en éteignant les torchères de méthane.
Nous parlons ici du méthane brûlé en sortie des puits de pétrole faute de pouvoir l’acheminer vers la civilisation. D’après les calculs de Daniel Batten, injecter ce méthane dans un générateur d’électricité au lieu de le brûler dans des torchères réduit leurs émissions d’équivalent CO2 de 63 %.
La raison étant que la combustion du méthane dans un générateur est complète. A contrario, les torchères laissent s’échapper 8 % de méthane dont l’effet de serre est 80 fois supérieur à celui du dioxyde de carbone (à l’échelle de 20 ans).
Dit autrement, il suffirait que 20 % des mineurs de BTC se branchent sur des torchères pour que le réseau Bitcoin jouisse d’un bilan carbone neutre. Ce chiffre tombe à 3 % en s’installant au-dessus des décharges d’où s’échappent 100 % du méthane.
Payer ses impôts en bitcoins ?
À la question de savoir si la France compte imiter l’État du Colorado, Bruno le Maire répond que « ce n’est pas à l’ordre du jour » :
« Notre monnaie est l’euro et n’avoir qu’une seule monnaie pour payer l’impôt est une condition de notre unité. Je vois mal comment nous pourrions assurer l’égalité devant l’impôt si chacun choisissait sa monnaie pour le payer. »
Touché. Où allons-nous si chacun pouvait créer son propre pastiche de bitcoin pour payer ses impôts ?
« Je le dis sans ambiguïté, notre monnaie doit rester l’euro et le bitcoin n’a pas vocation à devenir un moyen de paiement à grande échelle dans l’Union européenne », a-t-il ajouté.
Soit. Le bitcoin n’a de toute façon pas besoin de permission pour être une monnaie. Il n’a même pas besoin d’être l’unique monnaie en circulation pour remplir son rôle primordial de réserve de valeur.
Et puis, soit dit en passant :
Cela dit, et sans vouloir faire le jeu de Bruno Le Maire, ses propos sont l’occasion de nous demander si un monde ayant le bitcoin pour seule et unique monnaie serait idéal ?
L’incapacité d’emprunter est-elle vraiment compatible avec une civilisation complexe requérant des investissements gigantesques pour la recherche et les infrastructures énergétiques ?
Par exemple, Total a récemment investi 16 milliards d’euros pour créer une plate-forme capable de pomper du pétrole à 3 500 mètres de profondeur, au large de l’Angola. L’opération permettra de produire environ 13 % de la demande actuelle française pendant 20 ans.
Comment lever autant d’argent dans un monde ayant pour seule monnaie le bitcoin ? Qui acceptera de bloquer son argent pendant des années pour financer ce projet ? Total devra-t-il démarcher les Français un par un pour les convaincre de lui prêter leurs BTC ?
Le meilleur système ne serait-il pas in fine d’avoir deux monnaies ? Une pour l’économie, l’autre pour épargner ?
Le Maire et la blockchain CBDC
Nous attendions avec gourmandise le jour où M. Le Maire viendrait nous servir l’amalgame entre CBDC et Bitcoin.
C’est chose faite. L’ancien ministre de l’Agriculture estime que « l’affirmation de l’euro comme seule monnaie de référence ne doit pas nous empêcher de profiter des potentialités offertes par la blockchain ».
« C’est pourquoi je suis avec intérêt les travaux de la BCE pour concevoir un euro numérique », a-t-il lâché. « Je crois aux vertus de la blockchain au service de l’euro, pas en l’abandon de celui-ci au profit du bitcoin. »
Des propos à faire froid dans le dos quand on sait que Bercy a récemment déclenché le tollé en demandant un accès en temps réel aux relevés bancaires…
Voici ce que nous écrivions récemment à propos de la CBDC :
« La CBDC s’annonce comme une monnaie programmable. Son utilisation serait conditionnée. La banque centrale indienne avance même qu’elle pourrait devenir périssable :
« Les CBDC offrent la possibilité de programmer l’argent et de conditionner leur utilisation finale. Par exemple, nous pourrions nous assurer que l’argent issu d’un crédit agricole ne puisse être dépensé nulle part ailleurs que chez des marchands d’intrants [semences, pesticides, engrais]. […] Nous pourrions aussi pousser à la consommation en ajoutant une date d’expiration à l’argent. Cette programmabilité peut être obtenue en utilisant des smart contrats ». »
Le FMI confirme:
En parlant de smart contract, notez que la banque centrale norvégienne est en avance sur la CBDC. Et surprise, surprise, les nordistes se basent sur le code de l’Ethereum. Il ne reste plus qu’à troquer les pseudonymes cryptographiques pour des identités numériques biométriques. Ironique…
De quoi expliquer la tendresse de Bruno pour l’ethereum et la fin du cash ?..
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