Bitcoin & géopolitique - Semaine 2
2023 s’annonce aussi mouvementé que 2022. Les tensions géopolitiques vont se renforcer et offrir un terrain fertile au bitcoin.
2022, l’année charnière
L’importance historique de 2022 dépasse celle de 2001, marquée par les attentats du 11 septembre. Mais aussi 2008, année de la crise financière sur fond de pic de pétrole conventionnel.
La signifiance de 2002 sur le plan géopolitique est à rapprocher avec 1991, date de la fin de la guerre froide. En déployant sa puissance militaire en Ukraine, la Russie a pris la tête d’une fronde globale contre l’ordre international dominé par les États-Unis.
New Delhi a résisté aux pressions occidentales lui enjoignant de participer aux sanctions contre la Russie. Chargée de la présidence du G20 en 2023, l’Inde va pouvoir accroitre son influence.
Le sous-continent indien s’occupe de ses propres intérêts comme en atteste son attitude neutre, voire plutôt conciliante envers la Russie depuis le début de la guerre en Ukraine.
Non content de s’abstenir lors des votes successifs de l’ONU condamnant l’agression russe, le président Narendra Modi a multiplié par 50 les importations de pétrole brut en provenance de Moscou. L’Inde est devenue l’un des plus gros acheteurs de pétrole russe, faisant échouer la stratégie d’isolement menée par l’Occident.
Les Indiens se considèrent comme de « vieux amis » de la Russie. Les relations sont si bonnes que Moscou a livré son système de défense antimissile S-400. Une part importante des équipements militaires indiens est russe, sans parler des transfers de technologies militaires.
Toutefois, la Russie accepte toujours les paiements indiens en dollar et non pas en roupies. La raison étant que le déficit commercial de l’Inde envers la Russie augmente un peu trop vite. Bientôt des échanges en or ? En Bitcoin…
Ryiad et Pékin main dans la main
La défiance vis-à-vis du dollar est aussi palpable au Moyen-Orient. Riyad a profité de l’offensive russe pour s’émanciper de la tutelle américaine. La fin de non-recevoir adressée à Joe Biden qui s’est déplacé jusqu’au royaume pour glaner une augmentation de la production de pétrole restera dans les annales.
De même que l’accueil en grande pompe de Xi Jinping quelques semaines plus tard. Le président chinois a également profité de la diversion russe pour placer ses pions en exhortant les pays du golfe à accepter le yuan.
La visite de Xi incarne une nouvelle réalité et un tournant historique pour le Moyen-Orient, longtemps chasse gardée des États-Unis, notamment par le biais de leur présence militaire. Nous assistons à l’affermissement d’un monde multipolaire voulu par la Chine, la Russie et bien d’autres pays.
Ce n’est qu’une question de temps avant que la Chine jouisse du fameux « privilège exorbitant » en achetant aussi son pétrole dans sa propre monnaie, le yuan. Après tout, la Chine est le plus grand client de l’Arabie saoudite.
L’Histoire est en marche. L’assureur Allianz le confirme en révélant que la part du commerce chinois réglée en yuan est passée de moins de 20 % à près de 30 % entre 2020 et 2022.
En 2022, les exportations chinoises de voitures ont augmenté de 50 % par rapport à l’année précédente. La Chine a dépassé l’Allemagne en tant que deuxième exportateur mondial de voitures.
Les Chinois rattrapent aussi leur retard dans les domaines hautement stratégiques. Notamment au niveau des microprocesseurs, élément clé de l’électronique civile comme militaire. La Chine est également à la pointe en ce qui concerne le calcul quantique.
Et en Amérique du Sud ?
Suite à la réélection de Luiz Inacio Lula au Brésil, 80 % de l’Amérique Latine est désormais dirigée par des gouvernements de gauche. De bon augure pour la dédollarisation.
Voilà ce que l’ancien président brésilien Lula (président brésilien de 2003 à 2010 et de nouveau président en 2022) déclarait depuis sa cellule de prison en 2019 au journaliste Pepe Escobar :
« Les États-Unis étaient très effrayés lorsque j’ai commencé à parler d’une nouvelle monnaie. Obama m’a appelé pour me demander si j’essayais de créer un nouvel euro. J’ai dit que je n’essayais pas de me débarrasser du dollar, mais que j’essayais simplement de ne pas être dépendant.
L’alliance des BRICS n’est pas un instrument de défense. Son but est de créer un instrument d’attaque qui nous permettrait de créer notre propre monnaie afin d’être indépendants du dollar dans nos relations commerciales. »
Le président brésilien n’a pas changé d’avis. Le manifeste de son parti ambitionne de « créer une monnaie en Amérique latine, car nous ne pouvons pas continuer à dépendre du dollar ».
Tout cela étant dit, 40 % du commerce mondial est toujours réalisé en dollars. Les réserves de change des banques centrales sont aussi très vertes, à 60 % :
Il sera à ce propos très intéressant de suivre l’élection présidentielle en Argentine, un pays où les prix ont quasiment doublé en un an.
Le candidat Javier Milei a le vent en poupe. Le député argentin souhaite la libre concurrence des monnaies. Cela mènera selon lui à la dollarisation du pays. Le bitcoin sera alors en libre concurrence avec la monnaie fiat.
Nous pouvons donc anticiper que des banques internationales comme HSBC ou Citibank se chargeront des prêts. Le Bitcoin s’imposera pour sa part comme la monnaie d’épargne. Espera…
2023, année faste pour le bitcoin ?
Les développements géopolitiques de 2022 montrent clairement que l’hégémonie monétaire américaine s’étiole. Le vent de liberté monétaire qui souffle est de bon augure pour le Bitcoin qui s’engouffrera dans les brèches.
Il faudra bien trouver une monnaie commune si le monde cesse d’utiliser le dollar. Et ce ne sera pas l’or. C’est une évidence physique. La relique barbare ne peut pas servir à huiler les échanges mondiaux. Les stablecoins adossés à l’or sont également une vaste plaisanterie.
En parlant de stablecoins, notons qu’ils servent la plupart du temps à vendre ses bitcoins sans avoir à déclarer la plus-value au fisc. Malheureusement, leur quantité baisse. C’est un signe qu’une partie de l’argent ayant participé au dernier bull run s’en va vers d’autres classes d’actif.
Il faudra probablement que la décrue des stablecoins cesse pour retrouver de l’allant. Cela prendra le temps qu’il faudra :
Quoi qu’il en soit, d’autres pays marcheront dans les pas de l’Iran qui se sert du Bitcoin pour contourner les sanctions occidentales (déconnexion du réseau SWIFT). La Russie y songe…
Le ministre russe de l’Énergie Nikolay Shulginov a d’ailleurs récemment révélé que de nombreux mineurs s’installent en Sibérie. « La position du ministère de l’Énergie a toujours été de créer des conditions favorables au mining [de bitcoin] », a-t-il déclaré.
Le triomphe du bitcoin en tant que monnaie internationale prendra du temps. Mais les taux d’inflation effrayants et les scissions diplomatiques sont un terreau fertile pour son adoption par le bas. C’est le plus important.
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