À Bangui, des questions et inquiétudes après l’adoption du bitcoin comme monnaie légale
Peu de lois centrafricaines auront fait autant parler d’elles que la loi du 21 avril 2022, lorsque la République centrafricaine a donné cours légal au bitcoin sur son territoire, en même temps que le Franc CFA. Si quelques-uns, notamment dans le gouvernement du pays, ont salué une décision audacieuse, les opinions ne sont pas demeurées toutes positives sur cette loi. Les analyses sur la question sont multiples, nous présentons une synthèse.
Une porte de sortie nommée bitcoin ?
Pour plusieurs personnes, cette loi n’avait réellement pour objectif que de permettre au pays d’échapper un peu à la pression des Nations Unies en tentant d’encourager les transactions frauduleuses, selon les analystes dans un rapport d’Africanews du 5 mai.
Le langage des autorités du pays est évidemment bien loin de ces supputations, le président Faustin Archange Touadéra ayant plutôt présenté le texte comme une loi « régissant toutes les transactions » en cryptomonnaies et désignant le bitcoin comme « monnaie de référence » aux côtés du franc CFA. Pour lui, « cette démarche place la République centrafricaine sur la carte des plus courageux et visionnaires pays au monde ». Pour lui en effet, le pays fait face à de réelles difficultés pour les transactions financières et les cryptomonnaies pourraient aider à contourner ce problème et permettre au pays un accès plus facile à l’extérieur.
Mais ce discours peine à convaincre l’opposition et différents analystes qui mettent entre autres l’accent sur le fait que selon cette loi, « les échanges en cryptomonnaies ne sont pas soumis à l’impôt ».
De nombreuses inquiétudes
Plusieurs citoyens de la RCA ne connaissent pas les cryptomonnaies.
La légalisation du bitcoin suscite la consternation devant l’un des rares distributeurs automatiques de billets de la ville. Pour les citoyens qui n’ont pas un accès régulier à l’internet, l’urgence du pays semble être ailleurs. Cependant, le porte-parole du gouvernement, Serge Ghislain Djorie, s’est voulu rassurant quand il s’est adressé à l’AFP : « Nous allons éduquer la population et bientôt passer à la fibre optique et une faible connexion internet suffit pour acheter des cryptomonnaies. » Une fois encore, ce discours ne convainc pas vraiment, et surtout pas les hommes d’affaires qui même s’ils sont susceptibles d’avoir des ressources, demeurent en manque de l’expertise nécessaire.
« Je n’ai aucun intérêt à avoir des bitcoins ici, nous n’avons aucune infrastructure, aucune connaissance pour nous lancer dans cette aventure, il n’y a pas de cellule de cybercriminalité pour garantir la sécurité », explique un entrepreneur de Bangui, la capitale de la République centrafricaine, ajoutant : « il y a d’autres priorités comme la sécurité, l’énergie, l’accès à l’eau, internet, la construction de routes… »
Plus encore, la RCA ne semble pas avoir intégré la communauté économique et Monétaire de l’Afrique de l’Est et du Centre à laquelle elle appartient. Didier Loukakou, directeur de la régulation à la Commission de surveillance du marché financier centrafricain (Cosumaf), a déclaré : « Il y a actuellement un processus pour un cadre concerté entre les six pays de la Communauté économique des États de l’Afrique centrale (CEMAC), les autorités de lutte contre le blanchiment et les régulateurs pour légiférer sur les crypto-monnaies », mais « nous n’avons pas été notifiés par Bangui de sa décision ».
Plus inquiet encore est le Fonds Monétaire International qui a fait observer au gouvernement de la RCA que l’adoption du bitcoin pourrait apporter un déséquilibre encore plus profond à son système économique.
Le bitcoin est actuellement en chute libre, ayant connu une baisse de 6,63% au cours de la dernière semaine CoinMarketCap. La haute volatilité des cryptomonnaies fait que leur exploitation et surtout leur positionnement comme monnaie légale implique la prise d’un risque non négligeable. De l’avis général, la décision de Bangui pourrait bien être trop risquée.
Source : finbold.com
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Diplômé de Sciences Po Toulouse et titulaire d'une certification consultant blockchain délivrée par Alyra, j'ai rejoint l'aventure Cointribune en 2019. Convaincu du potentiel de la blockchain pour transformer de nombreux secteurs de l'économie, j'ai pris l'engagement de sensibiliser et d'informer le grand public sur cet écosystème en constante évolution. Mon objectif est de permettre à chacun de mieux comprendre la blockchain et de saisir les opportunités qu'elle offre. Je m'efforce chaque jour de fournir une analyse objective de l'actualité, de décrypter les tendances du marché, de relayer les dernières innovations technologiques et de mettre en perspective les enjeux économiques et sociétaux de cette révolution en marche.
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